En 1931, la république est déclarée en Espagne, au profit de la classe ouvrière. Cependant, 3 ans plus tard, les travailleurs en réfutent quelques aspects, notamment la réforme agraire, qui s’impose trop lentement pour eux. Les journaliers et les paysans sans terres s’épuisent pour un salaire misérable, ce qui débouche à une révolte en octobre : la révolte des Asturies, menée par les républicains socialistes. En 1936, lors des élections, 2 blocs s’affrontent : la droite carliste (pour les croisades, aspect religieux) et monarchiste, et le front populaire (frente popular). Depuis 40 ans, les violences ouvrières se multiplient en Espagne, envers l’Église qui favorise la noblesse et la bourgeoisie (éduque les enfants nés de classes aisées), et qui « est la gardienne d’un peuple destiné à disparaitre » (les classes les moins aisées). En 1936, le front populaire gagne, mais la bourgeoisie domine les classes inférieures. En réaction face à cette inégalité, les grèves des travailleurs se multiplient. Le 9 août, à Séville, un général qui alimente beaucoup d’espoir chez les partisans de droite est salué, ainsi que la sainte vierge. Cet homme, Franco, revient du Maroc alors en insurrection. À Madrid, une femme, Dolorès Ibarruri, communiste, lance aux républicains « no pasaran », en parlant des nationalistes prêts d’envahir la capitale.
Finalement La guerre civile débute dans les « sierras » du nord de Madrid. Les partisans de droite ont l’appui de l’Italie et de l’Allemagne qui leur fournissent des armes et les aident à les expérimenter, et parfois sur des petits villages (Guernica, 1937). La capitale est attaquée par les nationalistes, qui font reculer les républicains fin août 1936, et les contraignent à rejoindre la France. En septembre, Moscardo, un nationaliste, nargue les républicains en se réfugiant dans le château d’Alcazar. Le 28 septembre le siège créé par les républicains échoue, L’ « épopée d’Alcazar » devient une légende dans l’histoire des nationalistes. Enfin, en hiver 1936, l’Espagne est un véritable champ de bataille des idéologies qui s’opposent en Europe, le témoin d’expérimentations des nouvelles armes. Issu d’une famille bourgeoise catalane et républicaine, Semprun s’exile en France dès le début de la guerre civile en Espagne en 1936 au pays basque puis à la Haye. Le 26 janvier 1939, Barcelone tombe aux mains du général Franco. La population catalane - et avec elle des milliers de républicains provenant de toute l’Espagne - se dirige vers la frontière française pour fuir les bombardements. Les émigrants doivent traverser les Pyrénées dans des conditions difficiles : ils ont peu ou pas de vêtements et de provisions, et le col des montagnes est enneigé.
Le 28 janvier, la frontière française s’ouvre aux civils uniquement, puis le 5 février accueille également des soldats républicains. Les plages d’Argelès-sur-Mer, du Barcarès et de Saint-Cyprien sont les témoins de camps construits à même le sable par les réfugiés. Il y a beaucoup de décès lié au manque d’hygiène, la plupart des espagnol attrapent des champignons sur la peau, parce qu’elle reste trop longtemps en contact avec le sable. Les femmes sont agressées en permanence, si bien qu’elles se regroupent pour se défendre, lorsque l’une d’entre elle siffle pour alerter les autres. Les soldats français, vite dépassés par le nombre d’immigrants, se voient malmenés par ces derniers, quand ils tentent de leur apporter des vivres. Ils décident pour cela de jeter la nourriture sur les plages.
La même année, Semprun termine ses études secondaires au lycée Henri IV, puis étudie la philosophie à la Sorbonne, à Paris. En 1941, il s’engage dans la résistance (des Francs-tireurs et Partisans), puis en 1942, il adhère au parti communiste espagnol. En 1943, il est arrêté par la Gestapo et est envoyé dans le camp de concentration de Buchenwald. L’Écriture ou la vie est un livre que l’auteur composa 50 ans après son incarcération dans ce camp. Étant ancien étudiant en philosophie, il mène dans cet ouvrage une réflexion sur l’expérience du mal et de la mort. Le problème qui se pose à Jorge Semprun n’est pas simplement de raconter l’horreur, mais d’en trouver la racine, d’être écouté et compris. Pour l’auteur, il est important de composer non pas un simple récit à propos des camps, mais une véritable œuvre d’art en racontant ses expériences. « Ne parviendront à cette substance, à cette densité transparente que ceux qui sauront faire de leur témoignage un objet artistique, un espace de création. Ou de re-création. Seul l’artifice d’un récit maîtrisé parviendra à transmettre partiellement la vérité du témoignage. Mais ceci n’a rien d’exceptionnel : il en arrive ainsi de toutes les grandes expériences historiques . »
L’Écriture ou la vie, 1994